Invité du jour : Jean-Marie Séveno

Aujourd’hui, c’est un photographe breton qui est à l’honneur, Jean-Marie Séveno. Il arpente les forêts celtes qui l’enveloppent des brumes de l’automne et du brame du cerf.  Des pics de la Vanoise à la Scandinavie, de l’île Kodiak à celle de Banks, il a besoin de grands espaces, de solitude et de temps. 

Peux-tu te présenter en quelques mots ?

Bonjour, Je m’appelle Jean-Marie Séveno, je suis un breton de 42 ans et suis photographe animalier pro. Je photographie la nature depuis mes 10 ans. J’ai une affection particulière pour les grands espaces sauvages. Quand je photographie en Bretagne, ou simplement lorsque je m’y balade, ce qui me plaît est d’aller au rythme de ce qui m’entoure, me poser aussi. Juste profiter de cette beauté, en silence.

Comment as-tu commencé ?

Rapidement (vers l’âge de 12 ans), suite à de nombreuses observations d’oiseaux, j’avais envie de ramener des souvenirs des rencontres passées. J’ai donc mis de l’argent de côté pour m’acheter un appareil muni d’un 300mm et d’un multiplicateur. Cela dit j’ai commencé avant avec une paire de jumelles. C’est mon outil de prédilection; elles permettent certes de repérer la présence d’animaux mais aussi de se faire un oeil. Elles ont contribué (et continuent) à me faire une idée des cadrages que j’apprécie.

Quel a été ton déclic ?

Il n’ y a pas vraiment eu de déclic. J’ai toujours baigné dans un environnement où la nature tenait une place importante. Là où j’ai grandi la forêt entourait la maison. Je me suis mis à faire de la course à pied à l’âge de 6 ans et automatiquement c’était dans les bois que je m’entrainais. Durant le collège et le lycée je me suis arrangé pour faire des stages ou occuper mes vacances dans des réserves naturelles parce que ça me plaisait de connaître les oiseaux et leurs comportements. Plus tard j’ai travaillé quelques années dans les Alpes en limite du parc national de la Vanoise… Que ce soit avec un appareil photo entre les mains, une paire de jumelles, ou juste mes yeux, la nature est omniprésente, peu importe si j’en capture des instantanés, c’est un mode vie.

Comment définis-tu ton style ?

Je ne suis pas adepte des affûts payants. Je préfère chercher des indices de présence et rentrer bredouille plutôt que  payer pour ramener des images coûte que coûte. Tout cela se traduit par des images où souvent l’animal est dans son environnement, les portraits sont rares même s’il m’arrive d’en réaliser.

Le beau amène à l'apaisement.

De quelle manière aimes-tu travailler ?

Je n’étonnerai personne après les quelques réponse précédentes en disant que j’aime la solitude. Cela me permet d’avancer à mon rythme. Parfois en billebaude, plus souvent en affût. J’adapte mes réglages à la situation: j’utilise la priorité à l’ouverture mais pour sublimer les déplacements (notamment les flous), je privilégie la priorité vitesse. Et quand les lumières sont délicates, je me mets en priorité manuelle.

Qu’est-ce qui est le plus gratifiant dans ta pratique de la photo ?

Dans ma démarche, l’important est de ne pas déranger l’animal. Quand on est présent sur un site, qu’un animal arrive, se nourrit et poursuit son chemin sans s’être aperçu de notre présence, c’est là la meilleure des observations.

Et le plus difficile, ou décevant ?

Le plus difficile,  je dirais que c’est un peu fonction d’où l’on est. Plus concrètement il est plus compliqué d’observer (et donc encore plus concernant la photo) des cerfs en Bretagne qu’en Sologne ou dans l’Est de la France. La loutre est présente en Bretagne. J’en ai observé, mais rien à voir avec l’Ecosse où, sur un séjour de seulement 9 jours, j’en ai vu 12 (et photographié certains individus à quelques mètres).  Tout est question de contexte selon moi.  En revanche l’échec, c’est à dire ne pas avoir vu l’animal ou réussi la photo, n’est pas une déception. Ce peut être frustrant si on n’a pas utilisé les bons réglages mais c’est quelque chose de formateur. En général on ne se fait pas piéger 2 fois.

Quelle reconnaissance attends-tu ?

Absolument aucune, je ne pratique pas la photo nature pour flatter mon égo. Ce qui m’intéresse est que chacun se sente concerné par la nature, qu’elle soit proche ou lointaine.

Que veux-tu exprimer dans ton travail ? Quel est ton message ?

J’aime montrer le beau, la douceur et la délicatesse du vivant. Je les ai toujours préféré à la mise à mort d’animaux au dépend d’autres. On sait tous comment va finir la gazelle à terre entourée de 4 lions. En revanche montrer une biche marchant en fond d’un étang, dans la brume, ça a quelque chose de mystique et suscite l’interrogation de ce qu’elle va faire, juste après. 

Le beau amène à l’apaisement. Je pense qu’il suscite l’émerveillement et la sensibilité de chacun sur son environnement.

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Jean-Marie Séveno

Je n'encourage personne à vouloir faire de la photographie son métier.

Quel est ton rêve de photographe ?

J’aimerais bien passer 2-3 mois en Alaska, mais aussi en Russie ou encore en Arctique. L’Alaska pour la richesse de sa faune et sa biodiversité, la Russie parce que j’y suis jamais allé et ça m’intéresse enormément. L’Arctique parce que l’atmosphère est unique: un mélange de quiétude et d’isolement, le tout partagé avec une faune extraordinaire.

Qu’est-ce qui le rend difficile à réaliser ?

Les finances. Je n’encourage personne à vouloir faire la photographie son métier. Les retombées (financières) sont faibles.

Est-ce important de montrer tes œuvres au public ? Pourquoi ?

C’est très important. Je pense qu’une image est faite pour être vue, pas pour rester au fond d’un disque dur. La partager par le biais d’une exposition, d’une publication, d’une conférence auprès de scolaires ou du grand public, c’est son essence même. Elle permet à celui qui la regarde de se raconter une histoire, de se questionner, de prendre conscience d’un fait, de témoigner d’un évènement. C’est selon moi un vecteur d’éveil des consciences.

Des projets ?

J’en ai 2 en ce moment. Le 1er est la  réalisation d’un livre (sortie en septembre 2020) qui traite de la biodiversité dans quelques-uns des derniers sanctuaires de vie sauvage de la planète (Patagonie, Himalaya, Arctique, Colombie Britannique). En parallèle une exposition accompagnera cet ouvrage et sera présentée sur des festivals photo nature et quelques autres évènements. 

Le 2nd est en cours depuis de nombreuses années (15 ans environ). Il s’agit de mettre en avant le patrimoine sauvage breton coté Terres. Quand on évoque la Bretagne, c’est souvent le littoral qui est mis en avant alors que l’intérieur du territoire est tout aussi intéressant et attachant. L’idée est un livre prévu pour 2022 qui mettra en avant cette facette de la Bretagne.

Quelles questions aurais-tu aimé que je te pose ?

Je ne vois pas!

Horizons Suspendus, fruit de nombreux séjours sur les traces de la biodiversité dans quelques-uns des derniers santuaires de la vie sauvage de la planète.

Rendez-vous le mardi 14 juillet avec Florence Dabenoc-Devaux

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